Art thérapie ...

05/03/2013 06:26

 

Pondichéry 04/03/2013

Une troupe franco-indienne de « Clowns sans frontières » s'est installée hier à la guest house. J'ai parlé avec Achille, le directeur et il m'a proposé d'assister à leur spectacle dans un orphelinat de garçons en ville. J'y suis donc allée cet après-midi, je suis arrivée en pleine séance de « cinéma » (Tom et Jerry projeté sur le mur défraîchi d'une grande salle où les enfants sont assis sur le sol de ciment). Je suis accueillie par un couple, de mon âge, je reconnais tout de suite leur charmant accent belge (de Bruxelles). Ils passent 6 mois par an à Pondichéry et consacrent une partie de leur temps aux orphelins. Puis, c'est l'heure du goûter, offert par le couple : viennoiseries et chocolat chaud (le chocolat vient de Belgique, il a été offert par le chocolatier « Jacques »(peut-être mes petits belges préférés le connaissent-ils ???). Le chocolat est excellent. L'ambiance me rappelle un peu celle des colonies de vacances (ou des pensionnats mais je ne l'ai pas vécue) des années 50. Il y a même une monitrice avec une baguette de bambou et elle n'hésite pas à s'en servir … Je ne peux rien dire, mais ça me démange !!!...

Ah ! Ces enfants-là sont loin d'être blasés ; je les regarde manger , ils dégustent chaque miette !

Puis le spectacle de clowns commence : 5 personnages (3 français, 2 indiens) réellement virtuoses et polyvalents : musique, acrobaties, magie, poésie, références artistiques (la moustache de Charlot, peut-être pas connue des petits indiens …), bagarres, coups de pieds aux fesses, courses poursuites, timidité amoureuse … Du grand art, vraiment. Je m'amuse beaucoup et je me régale de la qualité d'attention de tous ces enfants, subjugués … Participation très sérieuse, comme au théâtre de Guignol quand les enfants préviennent le héros que le gendarme arrive par derrière … Rires salvateurs, générosité des comédiens qui se donnent à fond …

Lors d'un tour de magie une comédienne fait disparaître de sa main un mouchoir. Elle appelle un enfant sur la scène et … sort le mouchoir de son oreille !!!... le petit retourne s'asseoir et, je l'ai vu, pendant un bon moment, se mettre le doigt dans l'oreille, cherchant à comprendre, sans doute, comment s'était produit ce « miracle » …

Après le spectacle, les enfants balaient la pièce car c'est leur dortoir. Ils y installeront leurs nattes pour la nuit. La femme belge (une ex psycho-pédagogue qui forme un peu le personnel enseignant de ces institutions) m'expliquait que tous ces enfants ne sont pas orphelins, certains sont là car leurs parents n'ont pas les moyens de s'en occuper, ils restent donc en « pension » et rentrent de temps en temps chez eux. Ils ont ainsi au moins le gîte, le couvert et l'école … Nous parlions aussi des infirmités souvent rencontrées dans la rue : elle me disait qu'elles étaient souvent dues à des avortements ratés, à des accouchements problématiques, à des consanguinités assez fréquentes, voire hélas encore à des mutilations volontaires ... Que deviendra la mignonne petite Rose ???...

Du spectacle encore : hier soir le hasard a bien fait les choses ! Rue Romain Rolland, je me suis arrêtée devant une affiche à l'entrée du « Pathé-Ciné familial » avec son bel emblème de coq. Il s'agissait de théâtre : mise en scène contemporaine d'une partie du Mahabarata (La grande Légende Indienne) intitulée Kunti-Kama , en anglais : combat fratricide entre le fils illégitime (abandonné par sa mère au fil de l'eau du Gange, ça doit vous rappeler quelque chose ???...) et le fils légitime. Deux acteurs seulement (l'un d'eux joue également la mère). Un mur nu éclairé par de petites lampes à huile , un grand bassin plein d'eau (c'est le Gange) d'où émerge soudain le personnage trempé, un immense morceau d'étoffe blanc pend du plafond et permet de remarquables acrobaties. Superbes combats d'art martial : le blanc et le noir s'affrontent, torses huilés ou ruisselants mettent en valeur la musculature … Quelques déclamations magnifiques de violence et de désespoir et le silence … habité … vivant …

Quelle chance j'ai eue de passer par là juste avant le début de la représentation. J'y ai d'ailleurs sympathisé avec une française (de passage elle aussi) de Versailles, artiste peintre. Elle vend ses tableaux. Allez, je lui fais un peu de pub bien que n'ayant encore rien vu de ses oeuvres : vous pouvez aller sur son site : www.corinnegodat.com

En ce qui concerne le metteur en scène de la pièce, il s'agit de Koumarane Valavane (il parle couramment français), il est directeur de l'Indianostrum Theâtre et a eu l'occasion de travailler en France avec Jean-Claude Carrière. Site du théâtre : www.indianostrum.org