Madurai : entre spiritualité et sauvagerie ...
En écrivant le titre de cet article je me suis dit qu'il résumait bien ce que j'ai ressenti, selon les moments, pendant ces quelques semaines passées en Inde. J'aurais aussi pu dire (je crois l'avoir déjà évoqué) :« entre attirance et répulsion », ou « entre sérénité et violence » … Intéressant de voir comment cela va évoluer pour moi au fil du voyage.
Mais revenons au concret du jour :
La terrasse de l'hôtel Suprême (ordinaire malgré son nom) est au 6ème étage et offre une vue magnifique sur la ville et le temple. Un bon petit vent frais y soufflait ce soir, éloignant les moustiques et reposant de la canicule du jour … J'y ai dîné en compagnie d'un couple de français d'Aix-en-Provence : échanges d'anecdotes et de bonnes adresses. Repas simple et savoureux : raïta d'oignons et riz kashmiri (avec ananas, raisins frais et sec, noix de cajou et petite sauce aigre) et, un bon thé massala (épicé) pour finir : le tout pour environ 2 € ... J'apprécie vraiment ces échanges car ceux que je peux avoir avec les indiens restent superficiels.
Parenthèse qui n'a rien à voir : je ne sais pas si on en a parlé en France, mais ici la une des journaux de ce matin était sur 2 attentats terroristes à Hyderabad (Andra Pradesh, très au Nord de Bengalore).
Visite du Temple ce matin donc : immenses et impressionnantes ces hautes tours recouvertes de milliers des sculptures colorées de dieux, déesses et démons de toutes sortes … Foule colorée également : dévotion front au sol, dépôts d'offrandes (nourriture, fleurs), petites bougies alimentées au ghee (beurre clarifié), statuettes aspergées de lait et colorées de poudres rouges, jaunes que l'on se passe ensuite sur le front … j'ai passé autant de temps à regarder l'architecture qu'à observer les gens. Puis, comme eux, à l'heure du repas, je suis allée à l'échoppe acheter quelques en-cas : riz enveloppé dans une feuille de bananier, beignet sucré, petite boule jaune de je ne sais quoi, sucrée aussi et épicée à la cardamome. Un petit régal qui m'a redynamisée pour la suite de la visite ...
Repos à l'hôtel à la fermeture du temple : une douche fraîche, quel bonheur !
Ce matin : petit déjeuner avec bon café noir, toasts avec mauvaise confiture chimique, corn flakes, fruits et jus de fruits frais. J'ai apprécié parce que je sature un peu des curries et dhal du matin …
En fin d'après-midi, j'ai repris la découverte de la ville, m'égarant parfois dans des ruelles épargnées par la circulation. J'y ai rencontré des vaches paisibles (pas trop maigres), des vendeuses de magnifiques légumes, des éclopés, des infirmes, une échoppe glauque où l'on tuait un poulet, une autre qui empestait le poisson séché, et, partout, des femmes assises au sol fabricant des guirlandes et des parures de fleurs. Fleurs pour le temple, pour les chevelures, pour les voitures, les motos, les rickshaws, fleurs protectrices … Femmes parfois très âgées (en apparence au moins) à l'air épuisé mais fabricant leurs colliers avec une dextérité et une rapidité étonnantes … Une véritable industrie !
Alors que j'avançais dans cette jungle urbaine, j'ai soudain ressenti une impression bizarre et très excitante : la sensation d'une acuité redoublée de tous mes sens, d'une espèce d'animalité retrouvée, comme un instinct de survie alors que la nuit allait tomber … Après quelque cafouillage, j'ai parfaitement repéré tous les détails qui m'ont mise dans la bonne direction. Cela peut vous paraître exagéré, mais pour moi c'est la satisfaction de voir en oeuvre ma capacité d'adaptation en territoire inconnu …
Cependant, je sais que pour la suite, je vais éviter au maximum de séjourner dans les villes : trop de bruit, de poussière, de bousculades … Je veux me préserver et rester en forme pour bien profiter du temps qui me reste ici. Les français avec qui j'ai dîné tout à l'heure ont fait une semaine d'allergie à la pollution (la moitié de leur séjour !!!...).
Je pars donc demain pour Kodaikanal (32969 habitants, 2100 m d'altitude) dans les Ghats occidentaux. C'est à 120 km de Madurai (au Nord), il n'y pas de train pour cette destination, je prends donc le bus (4 à 5 h de trajet) et je fais confiance à tous les Dieux et Déesses, rencontrés au temple aujourd'hui, pour me protéger … Je vais pouvoir profiter de l'air frais de la montagne et d'une belle nature revigorante … J'ai pu facilement réserver une chambre d'hôtel, c'est la basse saison, il n'y aura donc pas trop de foule. Je déciderai sur place de la durée de mon séjour.
Si vous ne recevez pas de nouvelles dans les jours qui viennent c'est que l'internet n'a pas franchi la montagne …
Je vous embrasse.